Personnel de secours et traumatisme : que faire ?
© Patrick Decorte

Personnel de secours et traumatisme : que faire ?

Les professionnels des services de secours et d’urgence (secouristes, pompiers, ambulanciers, policiers ...) sont régulièrement confrontés à des événements hautement stressants, voire traumatisants. Des conseils concrets pour les aider à recouvrer leur équilibre après de tels événements.

 

Si une séance de débriefing
émotionnel est organisée, participez-y.

Si un collègue est décédé,
participez aux rituels de deuil tels que condoléances aux proches, funérailles, etc.

Ne prenez pas de décisions importantes
alors que vous êtes bouleversé. Accordez-vous le temps de la réflexion.

Soyez prudent
car dans les jours suivant un incident critique, vous encourez un risque accru de provoquer un accident. Dans la mesure du possible, évitez de conduire un véhicule, de manipuler une arme ou des produits dangereux.

Retrouvez une routine quotidienne
Il est important de trouver le juste équilibre entre repos et activité. Structurez vos journées en respectant des horaires réguliers. Rétablissez rapidement vos habitudes (règles, normes, activités, etc.) car la routine rend un sentiment de sécurité et de prévisibilité de l’environnement. Dormir suffisamment, se distraire, se nourrir correctement, limiter sa consommation d’alcool sont de saines mesures d’hygiène de vie.  

Détendez-vous
Octroyez-vous quelques jours de relâche et prenez soin de vous. Pratiquer une technique de relaxation ou de méditation, écouter de la musique, lire, regarder la télévision, prendre un bain, jardiner, bricoler, sortir au restaurant, boire un verre avec des amis, aller au cinéma, s’occuper de ses enfants, se promener dans la nature sont quelques unes des activités qui permettent de se détendre. Pratiquer une activité physique et participer à des activités sociales et récréatives permet de décharger l’anxiété et les tensions tout en libérant l’esprit des soucis. La plupart des systèmes philosophiques (par exemple, le bouddhisme) et les grandes religions offrent également des ressources essentielles pour de nombreuses personnes.

Partagez votre vécu

avec quelqu’un de confiance. Souvent, les personnes affectées par une épreuve commencent à se sentir mieux lorsqu’elles ont l’opportunité de parler, d’exprimer leurs émotions et de se sentir écoutées. Le mécanisme de défense qui consiste à refouler les sentiments désagréables interfère avec le processus de rétablissement psychologique. En effet, réprimer ses sentiments ou les taire peut être à l’origine de troubles somatiques, de dépression, d’anxiété et d’agressivité.
Rappelez-vous toutefois que vos collègues peuvent être bouleversés par le même événement que vous et être dans l’impossibilité de vous offrir un soutien efficace.
De même, parce qu’ils se représentent les difficultés que vous avez affrontées, votre famille et vos amis peuvent ressentir un «traumatisme secondaire» et être incapables d’écouter votre récit. Dans ce cas, une aide psychologique professionnelle peut s’avérer la solution la plus appropriée.

Si un soutien existe,

n’hésitez pas à y faire appel.
Certains organismes ont créé un réseau de soutien par les pairs regroupant des volontaires qui souhaitent aider par leur écoute leurs collègues en difficulté.

Demandez l’aide d’un professionnel
de la santé mentale en cas de troubles tels que souvenirs répétitifs et envahissants de l’événement, impression que l’événement pourrait se reproduire, cauchemars, dépression, anxiété, sensation de détachement, consommation abusive d’alcool, plaintes somatiques, comportements agressifs, etc. Certains organismes ont intégré des psychologues au sein de leur unité. Il est également possible de faire appel à un psychologue externe.

Nombreux sont les policiers, les pompiers, les ambulanciers et les secouristes qui se caractérisent par leur fermeté devant les épreuves et leur besoin de maîtrise. Ces traits de personnalité expliquent en partie le désintérêt de certains pour un soutien psychologique. De plus, leur identité professionnelle est directement corrélée à leur résistance et le culte dominant au sein de leur organisation est celui de la forte personnalité, capable de faire face aux situations extrêmes.
Dans ce contexte, solliciter des soins psychologiques peut être ressenti comme un aveu de faiblesse ou comme une inadéquation professionnelle. Or, être capable de solliciter du soutien est une capacité essentielle qui permet de rebondir et de bien fonctionner malgré les situations défavorables.

Sachez aussi que la souffrance traumatique peut émerger quelques jours ou quelques semaines après l’incident critique. Soulagé d’avoir échappé au pire et d’avoir retrouvé la sécurité, vous pouvez ne pas être immédiatement conscient de vos besoins psychologiques. Soyez attentif à toute modification de vos habitudes, de vos attitudes et de votre humeur et demandez de l’aide si des troubles psychotraumatiques apparaissent.

Acceptez vos limites 
Si vous jugez ne plus pouvoir assumer vos fonctions, consultez un médecin et signalez-le lui. Il vous conseillera peut-être un congé pour maladie.
Certaines personnes peuvent vivre ce repos forcé comme un échec ou se sentir coupable «d’abandonner» l’équipe. Or, accepter ses limites réclame une grande connaissance de soi et beaucoup de conscience professionnelle car les personnes en détresse éprouvent généralement des difficultés à reconnaître leur épuisement psychique et dénient souvent leur perte d’efficacité. Rappelez-vous qu’une personne souffrant de stress dépassé ou traumatique se révèle habituellement un poids pour ses collègues.

Ne pratiquez pas l’automédication 
Si vous pensez qu’une aide médicamenteuse peut vous être utile, parlez-en au médecin.  Ne consommez que les médicaments qui vous sont prescrits.

Article précédent : Le stress traumatique du personnel de secours : comment le reconnaître ?


Evelyne JOSSE
Psychologue, psychothérapeute
Auteur du site résilience-psy.com

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Pour aller plus loin :
En première ligne, Gérer le trauma, un combat au quotidien. Erik de Soir, Docteur en psychologie et Docteur en sciences sociales et militaires. Psychothérapeute, spécialisé dans la gestion des catastrophes, au sein du centre de traitement De Weg Wijzer (www.dewegwijzer.org)

Le débriefing psychologique est-il dangereux ? Erik de Soir sur : https://secunews.be/pdf/DEF_Debriefing_Psy_Erik_CA_011018.pdf